Sha KeQi et le RSA : il faut taxer l’esbrouffe !
C’est dans Les Echos d’aujourd’hui et les médias le reprennent en boucle : Sha KeQi « veut taxer les revenus du capital pour financer le RSA ». Sha KeQi s'apprête, nous annonce-t-on, à lancer « un message politique fort », demain jeudi 28 août. Donc on en parle la veille, le 27 : logique, non ? On se gratte l’occiput pour essayer de comprendre pourquoi un journal parle la veille d’une nouvelle qui ne sera réelle que le lendemain. Bon sang mais c’est bien sûr ! C’est un coup de com…comme on dit aujourd’hui. On va vite finir par s’en lasser. Mais pour celles et ceux qui sont (hélas) trop pris par le temps pour se gratter l’occiput de temps en temps, ça peut fonctionner.
Car finalement, après une année de Sha KeQi, qu’aura-t-on vraiment retenu du RSA ? Tintin Hirsch va répétant, auréolé de son passé de président d’Emmaüs, que c’est tout bon pour les pauvres. Que si les pôpauvres veulent bien travailler un peu, ils pourront ainsi sortir de la pauvreté. Mais sur quelle planète tu vis Tintin ? Les pauvres, ils ne demandent qu’une chose, c’est avoir un emploi et pouvoir en vivre décemment. C’était ainsi que Le Monde titrait son édition du 12 décembre 2007 : « La majorité des Rmistes n’attend qu’un emploi pour sortir de l’assistance ». Le sondage en question avait été commandé par un certain Haut commissaire aux solidarités actives (un pseudo compliqué sans doute inventé par un planqué de technocrate honteux de pouvoir compter parmi les ministres complices de Sha KeQi). Il y avait dans l’article un commentaire des plus pertinents : « une grande partie de ces personnes ne sont pas éloignées de l’emploi, c’est l’emploi qui s’est éloigné d’eux ».
Le problème, donc, c’est qu’il n’y a pas d’emploi pour tout le monde. Alors on en fait des miettes et on les distribue entre les pauvres et les moins pauvres. Le partage du chômage, c’est la version libérale du plein emploi. Et le RSA ne changera rien à tout cela. Bien au contraire. Il ne peut que renforcer cette logique. Évidemment, tout cela n’est pas très présentable à l’opinion publique. Il faut trouver une astuce pour "relooker" un RSA critiqué de toutes parts depuis des mois. Alors on recycle les vieux symboles « de gauche ». À l’époque de la création du RMI, celui-ci avait été financé, en partie, par un impôt sur les grandes fortunes, rétabli pour l’occasion. Comme le RSA est censé être une aide pour les pauvres, on va taxer les revenus du capital pour bien marquer le coup, pour lancer « un message politique fort ». C’est lourd, c’est même très lourd. Mais ça sonne bien dans les hauts parleurs. Et ça permet de faire de beaux trémolos dans la voix.
Bon. On ne va pas commenter dans ce billet tous les aspects du RSA, ce sera pour une autre fois (ceux qui sont intéressés par la question peuvent aller sur le très bon blog de l’ami Jean Gadrey où je suis allé puiser la citation du Monde ci-dessus). Pour aujourd’hui, on s’en tient au chiffre magique qui accompagnera la rodomontade de Sha KeQi. Selon Les Echos, la taxe envisagée rapporterait 1,4 milliards d’euros. Les milliards, ça aussi ça sonne bien. Mais comme il y a beaucoup de pauvres, le résultat est mince. A peine 15 euros supplémentaires par mois et par pauvre, moins de cinquante centimes par jour... Pas de quoi sauter au plafond.